De la délicatesse

Je suis habité par des images, successives, vives, prenantes, accompagnées de souffles torrides. Des images coquines, des images douces, empreintes de tendresse profonde, de suspensions. Des regards francs dilatés de désir, des extrémités de doigts fins effleurant des territoires de peau soyeuse, chaude, frissonnante.

Une lèvre charnue mordue légèrement, des paupières à demi-closes, un regard dirigé au sol par gêne de croiser l’admiration qui se trouve dans le mien, une beauté se laissant regarder avec délice et talent. Et chaque fois, mon attention soutenue, captivée, une attention tellement concentrée que tout autour semble disparaître et pourtant, se retrouve tout entier dans ce détail délicat. Parfois un geste chargé de délicatesse, une main se laissant caresser du vide dans une danse lascive et flottante. Une succession de gros plans au ralenti, rayonnants, contrastés, saturés.

Ce sont ces gestes, ces détails, cette grâce, qui me font tant aimer les femmes. Elles seules détiennent le pouvoir de créer ce vertige en moi avec autant de finesse. Les manières féminines révèlent des ouvrages d’orfèvrerie désarmants. Derrière chaque geste, une perle. Derrière chaque respiration, une pierre précieuse. Derrière chaque soulèvement de poitrine, une mine de diamants bruts.

Et moi, je suis un flibustier. Un corsaire des hautes mers. Un pirate ambitieux qui ne s’arrêtera pas de convoiter sans cesse davantage.

Je vois.

Je vois une chaînette dorée aux reflets de lune, parcourue de mon regard jusqu’à un pendentif turquoise. C’est un bouddha de jade cerclé d’or. Il me regarde et rit. Son rire me fouette dans un reflet de lumière vif et doux. Il a trouvé la plus chaude des demeures. Logé béatement dans le décolleté des plus plongeant, une poitrine d’une générosité inégalée. Dernier rempart à mes mains magnétisées. Elle oppose deux planètes jumelles, à mon corps défendant. Je laisserais volontiers mon visage s’y fondre. S’y imprimer à jamais. Je deviendrais bien ce bouddha de jade.

Mon désir s’étend jusqu’au bas de son ventre. Si bas même, qu’il englobe jusqu’à la terre sous ses pieds. Je suis affamé.

Je vois.

Je vois une autre poitrine. La même poitrine. Une autre chaînette. Un autre pendentif. Une ancre. Dorée. Aux mêmes étincelles. L’image est claire. Le message aussi. Qui ne voudrait pas s’amarrer à pareil pays? À pareilles collines? Pourtant, mon cœur est ailleurs. En mer, toujours. Tel est le destin des marins sans scrupules. Ils voguent d’un corps à l’autre, gonflant leur butin comme le vent gonfle leurs voiles, comme les belles femmes leur cœur.

Je vois.

Je vois une épaule dénudée. Une bretelle tombante. Une bouche. Ma bouche. Mes lèvres. Se poser sur cette épaule comme une libellule sur un nénuphar.

Je vois un port de tête altier, des cheveux remontés en chignon, révélant une fine nuque blanche, offerte à la dérobée des regards. À d’éventuelles visites impromptues de mes lèvres vibrantes.

Du désir. À la volée. À la pelletée. Jusqu’à l’ivresse. Des inondations de désir. Des tsunamis de désir. Des épopées de désir. Des coulées de lave de désir. Des frissons de désir renversants. Transcendants. Glapissants. Galvanisants.

C’est ainsi que se mêlent mes fantasmes et mes rêves… Et un peu de réalité.

 

[Source de l’image: Unsplash]

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