L’amour qui naît d’une première date

Cette semaine, j’ai assisté à une date. Je pouvais ressentir la nervosité de la première rencontre, même à deux tables de distance. Quels beaux moments que ceux-là! Remplis de gêne, de délicatesse, d’estime de soi. On se vend, on se donne, on met nos qualités de l’avant et on garde nos défauts bien loin. Surtout, on séduit, on se tourne la couette en se mordant les lèvres; on n’a pas encore peur d’avoir le coeur en mille miettes. Tout est permis parce que tout est possible.

Ça, c’est quand le courant passe; quand il y a une chimie. La date à laquelle j’ai assisté n’était pas comme ça. On avait droit à un numéro de stand-up pas comique du tout, de la part d’un gars qui parle beaucoup trop de lui, qui ne pose pas de questions, qui boit vite et qui se gratte furieusement la barbe. Le regarder me dégoûtait alors je me suis concentrée sur elle, la pauvre fille assise en face de lui. Elle souriait, dans sa belle robe, l’air de regretter d’avoir swipé à droite. Elle semblait avoir mis un long moment sur sa coiffure, qui était magnifique. Elle portait un maquillage discret, mais sublime. Elle était à son meilleur, un mercredi soir, pour aller prendre un verre avec un gars qu’elle ne connaissait pas. Elle était courageuse. Je l’admirais. Puis, à ma grande surprise, elle a ri. C’était une blague plate, mais elle riait. Comme pour l’encourager. La tannante! Elle prenait un risque.

Ces moments-là étaient vraiment précieux pour leur hypothétique future relation. Le gars avait fait le plein d’assurance, après avoir eu la confirmation qu’il était drôle. La fille se croisait les doigts pour qu’il possède d’autres qualités. En riant, elle leur avait donné espoir, à tous les deux. Ils continuaient de flirter avec, déjà, un beau souvenir dans leur banque. Ils allaient pouvoir raconter ce moment à leurs enfants, un jour, la larme à l’oeil et la joue chaude.

Le serveur est arrivé parce qu’il n’y avait plus d’alcool sur la table. Ils ne prendraient pas d’autres verres. Ils ont payé (séparément) et ont quitté leur table. J’étais déçue. Pauvre elle : elle n’aurait pas trouvé l’amour ce soir. Pauvre lui : il continuerait de semer des jokes poches sur son passage. Fin de la représentation, et il n’y aurait pas de rappel.

Pourtant, la foule était en délire! Affamée et, avouons-le, un peu en manque de peau. Ben maudit, ils ont frenché pendant dix minutes! Je le sais, j’ai regardé l’heure. Dans la fenêtre du bar, sur un coin de rue achalandé, à la lumière du lampadaire, ils ont frenché. Et pas un petit bisou poli; du gros french de torticolis. Leurs têtes dansaient le tango pendant que moi, la bouche entrouverte, je les fixais.

Elle a dû le trouver de son goût. Il doit penser qu’il l’a charmée grâce à son humour, en plus de bien l’embrasser. Aussi simple que ça. Il y a quelque chose qui, hier encore, n’existait pas.

Source de l’image: Gary Cooper and Fay Wray in the motion picture The First Kiss

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *