Ma rétrospective amoureuse

Hier, alors que je redescendais en train de Montréal vers la banlieue, j’écoutais de la musique en regardant par la fenêtre. Malgré le peu de passagers et le nombre incroyable de places disponibles, elle s’excusa, un peu gênée, puis prit place juste en face de moi.

C’était ma rétrospective amoureuse des dix dernières années. Elle me regardait, avec un fervent désir de savoir comment ça allait. Évidement, elle connaissait tout de mes histoires d’amour, des bons moments jusqu’aux durs coups. Elle savait que ça n’avait pas toujours été facile, mais la question qui lui brûlait le plus les lèvres, c’était de savoir si j’étais heureux aujourd’hui avec les choix que j’ai faits, ces dix dernières années.

Son regard était d’un rayonnement si intense que j’ai, sans réfléchir, retiré mes écouteurs pour entamer la discussion. Fascinée d’entendre ce que j’avais à dire, elle me posait toutes sortes de questions. Si j’étais fier de mon parcours, de mes dates qui sont devenues plus qu’une sortie au resto, si je regrettais de ne pas avoir fait de move à certains moments ou encore, comment je vivais actuellement mon célibat. Je lui ai répondu que je ne regrettais rien et que tout ce qui s’est passé s’est produit pour une raison ou pour une autre. Bref, que madame Destin avait aussi fait sa part des choses. Je lui ai aussi mentionné que les filles qui ont pour un moment fait partie de ma vie au courant des dix dernières années m’ont apporté beaucoup de bonheur, malgré certains chagrins, puis que mon célibat allait bien, que je travaillais beaucoup sur moi-même et sur le lopin de terre sur lequel je cultive mon bonheur.

Mes réponses semblaient la satisfaire, et elle souriait comme jamais on n’a pu me sourire auparavant. De mon côté, j’avais aussi quelques questions à lui poser. Plusieurs, sinon toutes, débutaient par: « Comment aurait été ma vie si…» Sa réponse fut globale pour toutes mes questions, mais c’est là que j’ai compris comment mettre les regrets de côté :

– « Ne te demande pas comment aurait été ta vie si tu avais fait tel ou tel choix; demande-toi plutôt si celui que tu dois faire aujourd’hui est la meilleure décision à prendre. »

En prenant le temps de l’écouter, je pouvais voir sur son visage qu’elle était heureuse de voir que je l’appréciais à sa juste valeur, malgré les soucis et les erreurs de parcours rencontrés en chemin. Puis, toute souriante, elle prit tout bonnement sa veste, me lança un clin d’oeil à la volée, puis quitta son siège. Elle est comme ça; c’est dans sa nature de passer aussi vite. Elle prend juste assez de temps pour nous ouvrir les yeux sur les bons moments de cœur que l’on a eu l’occasion de vivre.

Qui sait, je croiserai peut-être son chemin une fois de plus dans dix ans, question de continuer cette nostalgique discussion. Si jamais en prenant le train, le métro ou encore l’autobus, vous faites la rencontre de votre rétrospective amoureuse, je vous souhaite de trouver un coin de sourire comme elle a pu le faire avec moi, un mardi soir pluvieux dans un train de banlieue.