Voyager sans son chum

Je reviens d’un beau petit voyage de dix jours en Italie: dix matins, dix midis, dix soirs. 

Depuis au moins quinze ans, j’ai toujours été amoureuse. En peine d’amour, en amour naissant, en amour-fusion. L’amour est, et a toujours été, mon ultime quête.

Pause. J’ai voulu faire pause. Pour une fois, j’allais vivre quelque chose qui n’avait rien à voir avec un gars. J’allais diriger ma quête d’amour vers quelqu’un d’autre: moi.

Je suis partie en Italie pour m’émerveiller. Je n’avais pas d’autres objectifs. Pas de recherche sur les villes que je visiterais, pas de gros bagage lourd, pas de préparation outre-mesure. Je voulais être légère et me laisser bercer. J’ai appris l’italien, quand même. Oui, oui; j’ai appris une nouvelle langue pour dix jours de voyage. Je voulais être fière de commander au resto toute seule, dans cette langue qui me fait sentir vraiment sexy. Ça a marché.

Se sentir sexy même s’il n’y pas de gars autour pour le confirmer. Me sentir sexy juste parce que moi, un matin de septembre, en Italie, j’ai décidé que j’étais sexy. Beau de même, facile de même.

Vers la fin de mon voyage, j’ai rencontré une australienne vraiment cool. On a passé deux jours ensemble, en riant et en buvant des apéros, jusqu’au moment où elle apprend que je suis mariée. Elle s’étouffe, elle m’en veut: comment ai-je fait pour oublier un élément si important de ma vie?

Pour une fois, je ne parlais que de moi. De ce que j’aimais, de ce que je voulais visiter, de ce que je voulais manger. Pour une fois, je ne parlais pas d’amour. Enfin!

S’ensuivit une longue liste de questions sur mes motivations de partir seule, en vérifiant d’un oeil suspicieux si je portais mon alliance (oui); ma nouvelle amie capotait. Elle m’a expliqué l’étrangeté de mon choix de partir seule, aux yeux des inconnus. Elle me parlait de son ami depuis toujours, de qui elle est amoureuse, en secret. Que si elle trouvait le courage de lui avouer son amour et que ses sentiments étaient réciproques, elle ne partirait qu’avec lui en voyage, pour le reste de ses jours. Elle ne le quitterait plus jamais.

J’étais donc celle-là. Celle qui part sans son mari, gâtée-pourrie, qui part même si quelqu’un l’aime à la maison, qui part même si elle ne devrait pas avoir besoin de voir l’Italie, puisqu’elle peut sans aucun doute voir le monde dans les yeux de son homme.

Sauf que c’était dans mes yeux que je voulais voir le monde.

Source: Petit matin à Trieste par Valérie Dezelak

 

1 Comment

  • Camille dit :

    En couple depuis 5 ans, je ne me suis jamais empêchée de soit voyager (seule, en famille, avec des amies) ou de partir travailler à l’étranger sans mon copain. Je pense qu’il est tout à fait possible de vivre une relation saine tout en se permettant de vivre des expériences sans être toujours accompagnée par notre douce moitié. Cela prend toutefois deux partenaires matures!

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