En 2016, on entend souvent dire que les réseaux sociaux ont scrapé notre façon de s’aimer. Ou du moins, d’essayer de s’aimer en tentant, tant bien que mal, de se matcher. Tinder, Grindr, name it! Les réseaux sont multiples et les gens qu’on y rencontre… souvent à usage unique. Un phénomène contemporain, le ghosting, décrit comment l’un des deux partenaires disparaît, après quelques rencontres ou de simples échanges virtuels, pour ne plus jamais revenir. Sans laisser de trace, sans faire de mal (ou du moins, on peut penser que c’est son intention). Mon fantôme d’amour, plusieurs fois par jour…
On s’entête à dire qu’avant, c’était mieux. Que maintenant, c’est l’horreur. Sans s’en rendre compte, on sonne comme nos tantes qui commencent chacune de leurs phrases par « dans mon temps… » La vérité, c’est que les époques se ressemblent et les grands mouvements amoureux aussi. Oui, on a bien de nouvelles technologies qui nous permettent de mieux se domper mais aussi, se matcher. Tu peux maintenant retrouver ton premier kick du primaire sur Facebook et le relancer, au cas où tu serais passée à côté de l’homme de ta vie, dans l’innocence de tes cinq ans. Tu peux stalker tes ex au lieu de t’imaginer leur bonheur, pour donner une pause à ton cerveau qui met sur pied des plans machiavéliques pour gâcher leur vie. Tu peux chercher le nom de famille du dernier gars avec qui tu as fini la soirée dans une ruelle sombre derrière un bar miteux. Avant, tu allais voir dans ta boîte aux lettres tous les matins, au cas où un admirateur secret t’aurait écrit. Tu pleurais toutes les larmes de ton corps quand tu repensais à cette relation brève que tu ne pourrais plus jamais revivre. Tu t’inquiétais du lien de parenté que tu aurais peut-être avec le plus beau gars de la terre, que tu avais frenché hier.
Nos réseaux sociaux, ça a beau être moins romantique qu’une enveloppe rose qui sent trop le parfum pour une jeune fille de treize ans, mais c’est plus honnête, non? Si tu y penses un peu… C’est vrai que le ghosting, ça n’a pas de bon sens. Disparaître sans donner de raison, c’est vraiment ordinaire. Ça ne se fait pas traiter le monde de même, je sais. Mais au primaire, les gars changeaient d’école, des fois. Ou mieux, ils nous ignoraient dans le corridor! Ils nous voyaient, mais ils choisissaient de nous ignorer. Tsé! C’était ben pire! Ils déménageaient, ils refaisaient leur vie avec une autre Valérie, à quinze minutes de route de chez nous.
Plus loin dans le temps, les hommes partaient à la guerre pour des mois, voire des années. Ils écrivaient des lettres, oui. Mais pas tous les jours! Ils avaient des grosses journées, pas assez de temps pour prendre une petite pause de la guerre, s’asseoir à la chandelle, sortir leur plus belle plume et leur papier blanc… C’était la guerre, gang! Leurs fiancées n’avaient pas de nouvelles pendant des mois… Jusqu’à penser que coudonc, il était sûrement mort. Et elles se rematchaient, les pas fines. Avec Facebook, elles auraient au moins eu le luxe de savoir s’il était encore en vie! Elles auraient pu savoir ce qu’il avait mangé pour déjeuner, s’il avait encore tous ses membres, s’il avait reçu son dernier colis rempli de beurre de peanut et de photos sexy. Mais non, c’était pas comme ça. C’était pire.
Peut-être que tout ce qu’on a toujours voulu, au fond, c’est d’être aimés. Peut-être que ça nous a toujours fait de la peine d’être rejetés, de se faire laisser ou ignorer. On ne change pas tant que ça, à travers les époques. Pis on chialera toujours autant sur notre sort!
Source de l’image: Love pen bed drinking