L’amour à rabais

5347091201_e15347e417_b

Tu n’as même pas eu le temps de voir l’été se terminer que l’hiver est presque arrivé. L’automne est passé où? C’était vraiment ça cette année? Bref, t’as l’impression que t’enfilais tes gougounes pour la première fois y’a pas si longtemps, pas il y a (déjà!) trois mois. La fin de la saison estivale te rappelle surtout une chose : ça fait maintenant un an que tu es célibataire. Quatre saisons à danser entre différents corps, à apprendre à conjuguer avec différentes personnalités, mais jamais assez pour parler la même langue. Tu commences à avoir fait le tour des Quatre saisons de Vivaldi (même si tu les aimes ben gros).

Tu pourrais te réinscrire sur des sites de rencontres plus souvent qu’autrement dédiés aux perdus de l’amour. Tu pourrais te magasiner des soirées libre-service dans lesquelles t’aurais probablement l’impression de t’amuser, dans lesquelles tu pourrais trouver de l’affection superficielle, des pourquoi pas assortis à des on verra. Mais non. C’est fini ce temps-là. C’est fini, car t’as pu envie de consommer de l’humain (et par le même coup, de te faire consommer) comme on consomme un vulgaire chandail sur un présentoir chez Simons.

Les sites de rencontre, c’est un peu comme aller magasiner un 3 janvier au boxing day. On se garoche tous sur le morceau en spécial. Pas parce qu’il est spécial, parce qu’il est en spécial. Nuance. On ne prend même pas le temps de l’essayer, de le toucher, de voir de quelle matière il est composé, d’où il vient. Non. La seule chose qu’on sait, c’est qu’il doit être dans notre sac, merci bonsoir. La plupart du temps, on arrive à la maison et on réalise que le vêtement est loin d’être aussi beau que ce qu’on croyait avoir vu à la boutique. Il lui manque un bouton, les fils sont décousus. Parfois, on n’a même pas pris la bonne grandeur. En gros, quand on le met, on réalise à quel point il ne nous va pas pantoute. Tout ça, parce qu’on n’avait pas envie d’attendre dans le lineup … Parce que c’était trop long et qu’on devait l’avoir tout de suite. Et le pire, c’est qu’on est fâché parce qu’on se fait croire qu’on a perdu notre temps. Avoir su, je l’aurais laissé là-bas. Avoir su, t’aurais surtout pu prendre le temps de choisir. Mais tu ne l’as pas fait.

Peut-être même qu’au moment où t’as pris le chandail entre tes mains, tu le savais que ce n’était pas vraiment ton genre, mais tu t’es dit qu’avec le temps, tu finirais sûrement par l’aimer et le trouver beau … Tu t’es dis qu’à force de le voir tous les jours, l’envie de le porter se ferait probablement sentir. Et que dans le pire des cas, tu irais te faire rembourser ou juste t’en acheter un autre. Pourquoi pas? Tu te gardes même deux ou trois modèles en backup pas trop loin juste au cas où tu les trouverais soudainement plus attrayants…

Au lieu de s’acheter des morceaux cheap à 20$ qu’on change sans arrêt, on pourrait faire le choix de travailler fort, vraiment fort, pour se payer celui qui pourrait nous durer longtemps, très longtemps. Et si on travaillait encore plus fort que ça, on pourrait même avoir celui qui vient avec la garantie à vie. C’est certain que ça impliquerait des sacrifices. Que ça impliquerait de se concentrer sur un seul morceau et de laisser faire les autres. De laisser faire le magasinage compulsif du vendredi soir. Et souvent, on n’est pas prêt à ça. On préfère avoir une garde-robe pleine de vêtements dépareillés, parce qu’on privilégie la quantité à la qualité.

Ça me fait un peu (pas mal) penser à ça, les sites de rencontres. Et tu ne veux plus ça. Être un walk-in (au sens propre et figuré) remplit d’échantillons de toutes sortes que tu n’aurais jamais envie de porter pour aller souper chez ta mère. Alors, si tu dois te retaper un classique, aussi bien que ce soit les quatre saisons de Vivaldi (encore) plutôt que Candy Shop.

[ Source de l’image : Sans Titre par Alex ]

1 Comment

  • audrey dit :

    complètement raison !

    mais plus que les sites de rencontres, t’as aussi les gens qui « magasinent » l’amour. du genre « je vais voir si je peux trouver mieux » ou les bons « je teste le menu »…

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *