Personne ne peut me contredire sur le fait que nous vivons aujourd’hui dans une époque où la machine du temps marche à plein régime. Tout le monde court et on court vite. Que ce soit au travail, après le travail, au gym, avec les enfants et même au lit. Tout doit être fait vite et bien, donc vite, vite, vite les préliminaires, qu’on en finisse avant 22 h. Au fond, la vitesse ne fait pas économiser du temps; elle le saute, l’enjambe, sans que nous ayons pris connaissance du moment vécu.
Il ne faut pas être surpris de constater que nous sommes de plus en plus impatients et de moins en moins capables de supporter l’attente et les délais qui nous éloignent de la satisfaction immédiate de nos besoins.
Il faut parfois savoir renoncer à l’urgence pour se concentrer sur ce qui est important; sacrifier le besoin pour laisser place au désir. On voudrait donc avoir une plus grande maison, une auto plus spacieuse, un nouvel amoureux (car celui qu’on a nous tape sur les nerfs ces jours-ci), et pourquoi pas un nouveau cellulaire pour prendre encore plus de selfies. Plus on possède, plus on devient possédé par ses biens. On dirait que nous sommes rarement satisfaits, que nous désirons toujours en avoir plus et mieux.
Pourquoi cet empressement à vouloir être en couple?
Pourquoi tolérons-nous davantage le fait d’être mal accompagné que le fait d’être seul?
Pourquoi je me sens comme un spécimen rare lorsque je dis que j’assume mon statut de célibataire, sans enfants, à 33 ans?
Parfois, je me demande justement si je ne prends pas trop mon temps. Je ne suis peut-être pas encore devenu un modèle 2.0 : je me sens comme une personne âgée devant un guichet automatique lorsque je me retrouve devant les nouvelles technologies en matière de rencontre. Mes doigts se promènent sur un clavier « frette » et mes yeux sont fixés sur un écran. Adieu tactique de séduction et regards langoureux! Vous ne trouvez pas que ça manque de chaleur humaine comme premier contact?
Encore là, on va cliquer le plus vite possible afin de voir toutes les possibilités qui s’offrent à nous. Parfois, on manque une personne parce qu’on a cliqué trop vite sur la prochaine; parfois on ne prend même pas le temps de lire les informations que la personne a écrites à son sujet. S’il est beau, on aime; pas beau, on « flushe ». On a peut-être supprimé la personne que l’on recherche depuis longtemps, juste parce que l’angle de son visage faisait ressortir un double menton sur sa photo de profil.
Certains me diront : «Pourquoi vouloir prendre son temps quand nous avons maintenant la chance d’avoir plus de choix?» À cela, je réplique : «Parce que le vrai moment, celui qui laisse ses traces dans notre cœur et dont on se souviendra est celui qu’on aura vécu et savouré lentement. C’est en vivant pleinement, en étant présent et non en vivant dans l’attente de demain que l’on goûte aux petits moments importants de la vie. Rien n’est plus beau que les petits détails qui sont, en apparence, futiles. »
Alors, qu’attendez-vous pour vivre ces beaux moments?
[Source de l’image: Alice in Wonderland par Russ Sanderlin]
