Un jour, une fois, j’suis allée à Londres. Dans un élan de soif d’aventure, de découverte et d’émerveillement, j’ai rempli ma p’tite valise du strict minimum et j’suis partie pour une demi-année. Comme plus grand-chose ne me retenait ici à Montréal, j’avais tout à gagner en allant dans cette ville.
Rapidement, presque de façon irréelle, je t’ai rencontré. On s’est rencontrés dans un parc où ton accent québécois s’est jeté au-dessus de la mêlée d’accents british. Évidemment, la connexion entre nous s’est faite quasi automatiquement. On avait les mêmes références, les mêmes points de repère. Dans ce monde complètement nouveau pour moi, je retrouvais une part que j’avais laissée chez moi à Montréal. En plus, on venait tous les deux de la même ville au Québec.
En retraçant nos parcours respectifs, on s’est aperçu que les chances que l’on se rencontre dans le passé ont été nombreuses. On était allés à la même université, à certains événements, et même à plusieurs spectacles au même moment. Mais on ne s’était jamais rencontrés. Et toi, tu étais installé ici depuis quelques années. Il aura fallu attendre d’être à Londres pour débuter une relation amoureuse. Il aura fallu attendre qu’une pluie londonienne s’abatte sur nous et que tu m’invites à me réfugier chez toi pour que quelque chose naisse entre nous.
Dans ton appartement trop petit pour toi, mais trop grand pour moi, on a parlé jusqu’aux petites heures. À se nourrir ici et là, et à boire. Pour finalement que je décide de t’embrasser et qu’on s’endorme nos cœurs côte à côte. Mais déjà, entre nous, il y avait cet objet de nos futures tortures.
Ce billet aller-retour, que je détenais en poche pour deux saisons plus tard, plaçait une pression énorme entre nous. Au début, tout était léger. Petit à petit, on apprenait à se connaître, tout en même temps que je découvrais le pays. Parfois tu jouais le guide alors que parfois, j’errais dans les rues en essayant de ne pas me faire écraser par une voiture venant en sens contraire.
Après quelques-unes de nos rencontres, tu m’as fait savoir ce que toi, tu voulais. Tu as le mérite d’avoir été clair. Tu m’ouvrais les bras grand comme ça et m’offrais une place chez toi. Tu voulais que je quitte Montréal pour de bon. Que mon billet aller-retour devienne un billet aller-simple. Tu te projetais dans un futur commun, alors que j’avais de la difficulté à savoir ce que je ferais le mois prochain.
Puis, nos rencontres se sont distancées, parce qu’à chaque fois, on se blessait mutuellement. Toi, tu aurais voulu un oui. Un engagement de ma part. Que je laisse de côté mes amis, ma famille pour toi. L’enjeu était évidemment plus grand pour moi que pour toi. Nos rencontres étaient empreintes de larmes respectives. Notre seul point de rencontre était le rire. Mais il était toujours bref et compté. Il était notre espoir pour les quelques mois qui me restaient à Londres.
Le temps écoulé, j’ai dû reprendre mon avion pour mon Montréal. Tu n’as pas voulu venir à l’aéroport avec moi. Tu n’es pas apparu comme dans les films. Je n’ai pas non plus couru en sens inverse dans l’aéroport pour prendre un taxi et aller te rejoindre. On s’est quittés sous un soleil tapant. Je n’ai rien laissé chez toi et tu ne m’as rien laissé en retour. J’ai repris mon quotidien à Montréal, et on ne s’est plus jamais parlés. Les seules traces de ton passage dans ma vie sont dans ma tête et dans mon cœur. Si tu reviens à Montréal un jour, peut-être que quelqu’un quelque part pensera un peu à toi.
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