À toi que je n’oublierai jamais…

J’ai pensé à toi dernièrement. Ça fait un bout de temps que je ne t’ai pas vu la binette. À vrai dire je m’ennuie un peu de toi, de ta petite frimousse et de tes grimaces, de tes blagues et de cette petite joie que tu trimbalais avec toi, au bout de ta main, comme ces gamines qui balancent leur boîte à lunch en revenant de l’école, de l’innocence plein la tête, le cœur léger. Je m’y étais attaché.

Tu m’as expliqué et je comprends. Ça ne pouvait pas durer parce que tu es occupée dans tes responsabilités d’adulte, dans tes préoccupations de grand. C’est étourdissant être grand. C’est angoissant tout ce monde qui nous veut si rigide et normalisé. C’est castrant toutes ces opinions qui nous font oublier et qui nous éloignent de ces petites choses simples de la vie. C’est vrai que tout est rendu compliqué dans le monde des grands, que c’est moins facile rire quand on est plus vieux. C’est comme si on oubliait comment faire, à force de se faire dire que ce n’est pas le bon moment ou le bon endroit. Une chance qu’on n’a pas besoin de se rappeler comment respirer!

Pis c’est ça, un jour t’es partie et on ne s’est juste plus jamais revus. Ça m’a laissé une sorte de gros trou pas trop confortable dans les tripes. J’ai eu de la peine, parce que je l’avais apprivoisé c’te petite face-là. Je ne sais pas trop comment tout ça s’est produit, mais je l’avais apprivoisée à un point de ne jamais vouloir en être séparé. Mais j’ai réalisé que je n’étais pas assez grand, que j’étais trop perdu dans mes rêves de gamin, que je ne pouvais plus sourire sans avoir une raison de le faire. C’était naïf comme tu me le disais, tout ne pouvait être si simple. Tu t’étais mise à me répéter « Réveille! » pour que je te rejoigne dans cet univers de visages sans rides.

Je n’ai juste pas voulu t’écouter. Mais ce n’était pas vraiment contre toi et en même temps, j’en avais assez de ton air lourd et drabe. Je n’avais juste pas envie de donner raison au temps, de lui concéder cette victoire et de planquer mon petit bonheur aux oubliettes. Et c’est encore le cas aujourd’hui. Je vis ce sourire à chaque instant pendant que tu t’époumones à le pourchasser. En dernier, je n’avais plus vraiment la force ou la volonté de le partager avec toi. Tu le voulais tellement que, sans t’en rendre compte, tu m’en privais un peu plus chaque fois. C’est si simple pourtant, quand on veut se rappeler de l’existence de ce petit chemin heureux, on a qu’à s’y rendre de temps en temps et accepter de faire les choses différemment l’espace d’un moment.

Bref, avec du recul, je comprends mieux pourquoi je suis compliqué. Parce que c’est difficile se rappeler comment rire si spontanément, parce que c’est difficile résister au temps, parce que c’est difficile se tenir debout dans un monde qui nous veut à genoux. Je comprends mieux pourquoi je n’étais pas le bon gars, je comprends mieux pourquoi tu m’as oublié. Tout simplement parce que j’écoutais mon cœur pour qui tu étais importante et qui tenait à te le répéter à chaque instant, parce que tu as été et tu seras toujours spéciale et unique pour lui et moi. Tu me manques…

 

Oli.

[Source de l’image : Childhood memories de Éric Prunier]

 

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