L’amitié en balloune

D’un moment de passion, une série de petites cellules se sont mises ensemble pour créer la vie. Lui et moi, on a créé un petit être. Comme ça, si facilement. C’est une chance, un exploit, une fascination. Ce sont neuf mois de découvertes, de nouveautés, d’apprentissages. Neuf mois de partage d’un extraordinaire.

Mais, c’est aussi se sentir parfois seule, même bien entourée. Certains partagent ta joie et souhaitent vivre chacun de tes moments. Mais, j’ai compris que pour d’autres, peut-être, ma proéminente balloune les effraie. Je comprends, c’est nouveau, c’est différent. Sache, mon amie, que ce l’est tout autant pour moi. Mais, depuis qu’elle est là, plus près d’éclater chaque jour, plus je n’aperçois que le reflet de ton ombre. Je le vois que tu t’éloignes peu à peu. Involontairement, peut-être. Pas pour mal faire, mais juste parce que tu ne sais plus comment te comporter à mes côtés ni quels sujets aborder, comme si tous mes intérêts passés s’étaient envolés. Peut-être me scotches-tu malgré toi une étiquette erronée au front : « Mère en devenir. Ne boit plus. N’a plus de plaisir. Se couche à 21 h et tricote le vendredi soir. »

Pourtant, derrière ma bedaine pleine de vie, je suis toujours la même personne que tu as auparavant connue. Je fréquente toujours les pubs, seulement je sirote des bulles sans alcool. Je sors toujours au restaurant, je mange simplement des sushis tout cuits. Je suis encore capable de t’accompagner pour une marche santé, je suis juste plus lente et atrocement essoufflée. Je continue à aller voir des shows rock, je m’abstiens juste d’aller dans le mosh pit. Et, je te rassure, ma jauge de « matantisme » se maintient toujours au même niveau qu’avant.

Malgré tout, c’est inévitable. La grossesse et l’amitié créent leurs différends. Je suis l’amie qui a obtenu un nouveau statut et qui ne partage plus la même réalité que toi. C’est moins attirant. Ce sera parfois même dérangeant. Alors ton éloignement, je le comprends. Je n’étais juste pas préparée à ça. J’ai été naïve de croire que tout le monde deviendrait aussi gaga que moi.

Je tenais tout de même à te dire aujourd’hui que je ne t’en veux pas. Je respecte ton choix et remercie ta loyauté, car jamais tu as été l’amie qui a fait semblant. Maintenant, j’attendrai. J’attendrai le jour où toi aussi tu arboreras une jolie balloune et que tu désireras partager une tasse de déca bien fumante avec moi. Je ne suis pas inquiète, on rattrapera le temps perdu bien assez vite.

Alors, à la croisée de nos chemins, je te dis à bientôt.

 

[Source de l’image: Pixabay]

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