Tu me foutais la chienne

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Tu me faisais peur. J’réalise que je ne savais pas vraiment c’était quoi avoir peur avant toi. J’avais des chiennes relativement poches, genre les abeilles. Quand on y pense, c’est réconfortant de se dire que ta plus grande peur dans la vie c’est juste les abeilles. Juste ça.

Toi t’étais loin d’être un juste quelque chose. Tu n’avais pas de frontières, tu prenais toute la place.

Je t’ai dérangé un 14 février pendant ta lecture de Zola dans un Tim Horton parce que quelque part j’ai su que t’allais bouleverser ma vie. Tu t’es pointé chez moi avec une fleur quelques heures après notre maladroit au revoir parce que j’avais déjà bouleversé la tienne. Depuis, j’ai eu peur de te perdre.

Je t’en veux un peu de m’avoir incrusté ce feeling-là dans tous les pores de ma peau. Tu m’as aimé comme si c’était ce qui comptait le plus, plus que je ne m’aimais moi-même, jusqu’à ce que je m’aime moi-même. En me regardant dans les yeux quand tu me prenais, en me disant que j’étais belle, mais pas un belle de face, non, un t’es belle toi, ton âme. Tu m’as déshabillé l’âme sans pudeur, tu me l’as apprise par cœur. Tu as été doux, tu as été roff, tu été imparfait, tu as été parfait. Tu m’as laissé t’aimer de la même manière. Tu m’as appris à aimer quelqu’un. On s’est appris à aimer. Viscéralement. À s’en foutre la chienne.

À s’en foutre des 11h11, des étoiles filantes, des 25 sous dans la Fontaine de Trévi, à en laisser nos vœux aux autres parce qu’on avait déjà tout. On était des champs de mines, ça implosait de partout en nous et on s’expliquait ce manque de mots à s’exprimer nos feeling dégoupillés par le fait qu’on devait être les seuls à le comprendre, notre amour pur.

Une peur injustifiée, on ne fuyait pas le bonheur de peur qu’il se sauve, on l’embrassait à pleine gueule.

On dansait sur la soundtrack de l’autre sans s’essouffler, auxquels s’ajoutait nos deux voix en harmonie pis ça sonnait pareil pareil comme l’espoir. Fek on l’a fait mourir de faim, la peur. Elle est partie voir ailleurs ceux qui ne nous ressemblaient pas, ceux qui pouvaient la nourrir en échappant des p’tits bouttes d’amour derrière eux comme pour retrouver leur chemin l’un vers l’autre dans les détours noirs trop serrés de leurs histoires des fois croches. Nous, on ne se perdait jamais de vue. On le savait, c’était tout. Tu étais ma seule certitude. Notre histoire se tenait ben drette dessus, et les épreuves n’étaient que des petites brises pis on n’avait plus peur de rien, on ne se posait plus de questions même si on avait pas toutes les réponses pis on traçait demain jusqu’à l’autre bout de monde en entrecroisant nos lignes de mains, pis de corps, pis de toute ce qui pouvait se toucher, pis nous on était capable de toucher l’autre même dans les endroits les plus intouchables.

Tous les poils sur mes bras se raidissaient quand mes yeux te voyait, comme un frisson de il fait frisquet juste avant la première neige de novembre, sauf que toi tu m’enveloppais de chaleur juste à me regarder. C’était dans tes yeux que j’étais la plus belle, toute nue, en robe cocktail, en pyjama, avec ou sans rouge à lèvres.

Au fond, la peur de te perdre, elle m’a brûlé de frette juste quand je t’ai perdu. Parce qu’on s’est trop aimé pour se donner quelconques raisons d’avoir peur avant ça.

Mais je t’ai perdu.

Pis je ne sais juste pas comme je pourrais aimer encore après toi, si on peut ré-apprendre à être heureux comme on peut réapprendre à marcher après qu’un 18 roues nous aille passé sur le corps.

T’étais mon point fixe quand tout tournait trop fort. Pis là, tout tourne plus fort que jamais, des circonvolutions à donner mal au cœur au sens littéral et figuré, tout tourne encore autour de toi.

Tu me faisais peur. Avec raison. Raison que j’ai justement perdue depuis que je n’ai plus peur de te perdre.

[Source de l’image : 154/365 They’re Coming To Get You. par Martinak15]