À force d’expériences

J’ai 28 ans. J’habite devant le train de banlieue de ma ville. Je suis dans ce que l’on peut appeler la fin de la crise de la vingtaine, enfin j’pense.    

Ouf! Juste de le dire, ça me donne des frissons.   

J’suis probablement comme tous les gens de mon âge : dans un moment de ma vie que je trouve difficile. Mais comme je vis seul, c’est plutôt dur de se faire une idée sur le sujet. Je reste surpris que le moral soit bon; je tiens super bien le coup. Je trouve difficile de jongler avec tout ce qui se jongle. Dieu merci, je n’ai pas encore d’enfants (j’en veux éventuellement, mais c’est pas le bon timing). Anyway, tout le monde passe par cette crise, semble-t-il. Je ne crois pas avoir la vie la plus difficile et je n’aime pas me plaindre sur le sujet, mais j’aime parler de mes expériences de vie, d’un point de vue externe au tien.

J’admire ceux qui ont trouvé le métier qu’ils voulaient faire dans la vie et qui se dédient à cette tâche chaque jour de la semaine. Ceux qui sont sortis du secondaire et qui ont déjà dix ans de fait sur la préparation de leur retraite. Moi, depuis que je suis jeune, je veux tout voir et tout faire; j’suis un multidisciplinaire. J’ai voulu être pompier, policier, écrivain, artiste, photographe, programmeur, graphiste, assembleur en aérospatial, pour ne nommer que ces métiers-là. Le problème avec ça, c’est que t’as une base dans beaucoup de choses. Tu connais plein d’affaires, mais t’as aucune spécialité. Et c’est là que ça fait peur. Surtout quand le dernier métier que tu t’es botté le cul à apprendre est en chute libre et que les mises à pied se comptent par centaines. T’as des projets qui roulent bien, mais qui ne rapportent rien. T’as du plaisir, mais t’as peur pour ton avenir.

J’ai 28 ans. J’habite seul dans un 3 1/2 devant le train de banlieue de ma ville. J’ai déjà voulu devenir le meilleur compagnon de vie et investir du temps où ça en vaut la peine pour grandir à deux. L’idée d’avoir une belle maison et des enfants m’ont frôlés l’esprit. Sache que le libre arbitre existe; les gens changent et évoluent. Y’a des situations qui deviennent parfois hors de ton contrôle et sans le vouloir, ta vie change. Parfois c’est pour le mieux et parfois c’est plus triste, mais c’est correct comme ça; on grandit à force d’expériences. Sans les mauvais moments, on ne saurait apprécier les bons. Il arrive que l’on perde des gens de vue, puis qu’on en rencontre d’autres. On gagne de la bonne graine à force de mauvaises expériences.

Chaque jour, j’essaie d’être la meilleure personne possible. D’être là pour les gens qui en valent la peine. D’aider quand c’est possible et d’écouter quand c’est nécessaire. C’est important d’être là pour ceux qui comptent et qui t’aident à devenir meilleur. Parfois, tu te rends compte que tu accordes trop d’importance à certaines personnes et tu te fais du mal à aider des gens qui ne méritent pas ton aide. L’important selon moi n’est pas de recevoir au retour, et personne ne devrait rendre un service dans le simple objectif d’en demander un par la suite. Parfois, tu apprends des choses dans ton dos qui viennent de gens qui ne méritaient finalement pas ton aide. On gagne en bon jugement à force de donner aux mauvaises personnes.

Quand je me regarde dans le miroir, c’est flou. D’habitude, ça arrive quand je sors de la douche. Je pars donc la fan et j’attends un peu pour m’y voir correctement (ça prend environ trois minutes). Je ne sais pas pour vous, mais moi, des fois, je regarde de très près dans le noir de mes yeux pour essayer de me voir dedans. Ça marche jamais. J’ai plus de facilité à le faire dans les yeux de quelqu’un d’autre. Georges Rodenbach a déjà dit que « Les yeux sont les fenêtres de l’âme ». Ça me semble assez logique. Selon moi, la beauté d’une personne passe par les yeux. (Les seins aussi c’est beau, tsé, même s’ils sont petits. Mais bon, j’ai rien contre les gros seins non plus, c’est une question de goût. On entre sur un terrain glissant où j’ai pas envie d’aller. Vive les seins.)

J’ai 28 ans. J’habite seul dans un 3 1/2 devant le train de banlieue de ma ville et j’ai beaucoup appris sur moi-même dans la dernière année. Se remettre en question chaque jour fait partie du processus normal de la vie. Quelqu’un qui ne se remet jamais en question doit probablement se voir flou devant le miroir, même si celui-ci n’est pas embué. Il faut être reconnaissant de ce que nous avons et de ce qui nous entoure. Dire merci à nos parents et à la vie pour ce que l’on a. Dire aux gens « merci », « je m’excuse », « je t’aime » et « j’apprécie ». Moi, je suis reconnaissant  chaque jour que je me lève d’avoir un lit et un toit. J’imagine que, plus tu trouves ton bonheur dans les petites choses, plus tu profites de ce que tu as. Vieillir te fait simplement prendre conscience de beaucoup de choses, et comme moi tu n’as probablement pas cru tes parents lorsqu’ils te l’ont dit quand tu étais jeune. Bien aujourd’hui c’est à mon tour de le dire : « Mes chers parents, vous aviez raison. »

J’ai 28 ans. Dans un mois jour pour jour, j’en aurai vingt-neuf. Je suis dans ce que l’on peut appeler le début de la crise de la trentaine, enfin j’pense

Ouf! Juste de le dire, ça me donne le motton.

J’suis probablement comme tous les gens de mon âge, dans un moment de ma vie que je trouve difficile.

[Source de l’image : 13LKG0AGI0 par Dan Gribbin]

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