Il faut que j’me gère

Une fébrilité palpable, une excitation profonde envers une personne avec qui on va prendre un verre deux fois par année. On se mord les lèvres, on accroche notre verre par nervosité, on en prend une gorgée pour combler le silence avant d’entamer notre prochaine phrase. Un lourd silence. Un silence qui porte le poids de nombreuses années de sous-entendus et de désirs non assumés. Il suffit d’un eye contact pour qu’il te scanne les pensées; une tonne de fantasmes refont surface instantanément.

Il le sait.

Et tu le sais qu’il le sait.

Mais tu continues de caler ton verre pour oublier que tu ne te gères pas à ce moment-là.

Quand une personne nous rentre dans la peau comme ça, on s’ancre ben profond dans le crâne que ce ne sera jamais possible. Qu’il ne se passera jamais rien. Et c’est cette opportunité grandissante qui nous déstabilise ben raide. À croire qu’à force de s’imaginer des affaires, il devient difficile de discerner ce qui se passe dans notre tête pis c’qui arrive pour de vrai. Ou on veut tout simplement ne pas le voir.

Ne pas se rendre compte que ça fait je sais pu combien de rencontres que tous les deux, vous ne vous pouvez plus chacun de votre bord. Scotchés à votre banquette, vous vous fixez mutuellement la bouche, vous riez, et vous vous remettez à parler de vos projets respectifs.

Aucun move.

Ben du désir, par contre. La banquette à côté d’vous vous dévisage, tellement c’est clair.

Mais aucun move.

C’est plus facile que ça d’habitude, avec les autres. T’as juste à dire non, et ça finit là. Mais là, c’est pas pareil. Tu veux pas dire non. Et lui non plus d’ailleurs.

Par politesse vous allez vous donner deux becs, et repartir le sourire en coin jusqu’à votre voiture, en vous disant que c’est juste une question de temps. Que c’est inévitable.

Mais on va se le dire, personne est vraiment game de faire un move avec son crush.

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