Tiens-moi la main, chéri. Je saute.

Un peu égoïste de nature, je ne me suis jamais vraiment habituée au concept des décisions à deux. Tsé, les décisions où tout à coup, le bien-être et la santé de l’autre t’importent presque autant que tes propres rêves et ambitions. Il y a un revirement des priorités, l’équilibre qui s’installe m’est peu familier. C’est un peu ça, faut croire, la vie de couple. Des fois, ton bien-être prend même le dessus du mien. Et c’est là que les alarmes se mettent à sonner, c’est là que j’ai envie de prendre la poudre d’escampette vers cette époque où j’étais ma seule et unique priorité.

Parce qu’au fond, quand on refuse de laisser le couple prendre sa place dans la balance, on refuse un peu de s’abandonner. On se garde des barrières, toi et moi; des Plans B et des Plans C. On l’a toujours fait, au fond… toujours un peu sur la défensive. Même nos grandes aventures d’un pays à l’autre nous donnaient droit à un filet: une carrière qui m’attendait au Canada et toi, ton emploi et ta famille. En se gardant ces fameux Plans B, on a toujours eu le bout des doigts bien accroché au bord du précipice, on ne se laissait jamais réellement tomber tête première dans le gouffre qu’est l’amour. De temps en temps, on se laissait délirer en enlevant un doigt ou deux de notre perchoir – on se laissait pleinement espérer. Mais vite, on retrouvait notre méfiance, nos mains complètes s’agrippaient éperdument à l’entrée de la fosse sans fond.

Depuis les dernières semaines, on est arrivés à autre chose toi et moi; un croisement des chemins. Pleine d’insécurités face à ma grande décision; j’ai hésité, avancé, paniqué, abandonné et repris la charge. Et à chaque étape, tu étais là, patiemment à mes côtés. Il faut se l’avouer, ma décision de quitter mon emploi nous laisse plutôt vulnérables, maintenant tous les deux sans emploi. En plus, avec ton visa de touriste, il t’est presque impossible de travailler. Oui oui, ça pourrait être pire : l’univers semble m’indiquer que ma carrière de travailleuse autonome pourrait vivre un succès modéré… mais tu le sais tellement jamais, tsé.

À chaque pas apeuré, alors que je me retrouvais à paniquer sur notre futur financier, tu étais là pour me rappeler l’importance de ma propre santé, mon propre bien-être et ma propre fierté. Des fois, on oublie de leur accorder l’importance qu’ils méritent, ces grands piliers de la confiance et de la santé. On se laisse distraire par nos dettes, nos doutes et nos insécurités. De mon côté, je suis vite aveuglée par la peur. La peur de l’inconfort, de l’instabilité, des égos blessés.

Et ça, une chance, tu le sais.

Tout ça pour dire que cette fois-ci, je te regarde et je suis plutôt prête à sauter, si ça te dit.

J’ai les doigts et l’âme épuisés, j’ai plus envie de m’investir dans mes Plans B et C. Je veux mon Plan A, et ça, c’est toi – c’est nous. Je te sens fort et présent à mes côtés, on dirait que j’ai finalement trouvé mon partner in crime, tu pourrais être mon Jay-Z si tu m’acceptes comme Beyoncé. On va conquérir l’univers à deux, chéri, tu verras. Et peu importe l’éventuel impact sur mon compte de banque, notre garde-manger ou mon CV, je saurai que j’ai pris la bonne décision pour nous. Et ça, bin…I guess que c’est mon petit doigt symbolique qui se détache du bord du précipice et qui se laisse tomber.

Allons voir ce qui se passe là-dedans, même si c’est terrifiant.

J’suis game, si tu l’es.

Tiens-moi la main, chéri. Je m’apprête à sauter.

[Source de l’image: Semi Liberté par Sarah McMahon-Sperber ]

 

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