Faire l’amour un après-midi d’automne

Enfin un moment volé au tourbillon de la vie. Ma main tendue pour t’extirper de la tempête et nous retrouver, toi et moi, dans son œil. Un petit havre. Mon lit en dérive douce. L’instant d’un après-midi, nous arrêtons le temps et lentement, avec délectation, nous faisons l’amour, toi et moi. La plus inoffensive des rébellions. Un rayon de soleil doux perce les rideaux tirés, la lumière fait apparaître doucement ta peau tendre, dessine tes courbes avec la minutie d’un peintre. Mon regard tantôt affolé, tantôt affable. Te regarder et sentir ton corps chaud contre le mien est comme sentir une goutte de miel glisser sur la langue, sucrée, réconfortante, caressante et onctueuse.

C’est que les préoccupations, les études, le travail, les engagements, les essoufflements… L’automne est là, et l’hiver déjà qui se fond par légères morsures piquantes. Et cette illusion qui nous fait vouloir garder le rythme de l’été alors que tout ralentit et meurt autour de nous. La couleur des feuilles comme des feux de circulation. Vert on avance, jaune on ralentit, rouge on s’arrête. La fatigue. La grisaille. Nos jambes lourdes. Nos têtes enfumées. C’est que tout s’engourdit. Voilà pourquoi cette pause. Toi et moi, brandissant notre amour et nos corps crépitants, pour se garder du froid, pour accueillir l’engourdissement de la nouvelle saison.

** *

Voilà maintenant quelque temps que toi et moi, on partage notre vie ensemble. Main dans la main. Au hasard de nos élans et des affolements de nos cœurs embrasés. Cet espace, cet après-midi éternel, nous l’avons créé. C’est que pour s’aimer, il faut se parler. Il faut se dire les choses qui nous tracassent. Depuis que j’ai choisi de te voir toi et toi exclusivement, une étrange danse s’est entamée en moi. Un enracinement, un calme, côtoyant un désir de la fuite. C’est que tout à coup se sont dressées devant moi la multitude des femmes armées de désirs et de charmes balistiques. Comme si elles sentaient un trésor grandissant en moi, le petit jardin de l’amour que j’ai pour toi. Ce jardin encore tout simple, tout fragile, qu’elles veulent subtiliser. Mais ce jardin, il est pour toi. Et le céder à quelqu’un d’autre serait de le piétiner vainement. Je suis sensible aux charmes féminins. Je me laisse volontiers étourdir par un regard invitant, une bouche aventureuse, un souffle caressant. Mais jamais céder à ces approches ne frôlerait la profondeur et la subtilité que seuls toi et moi pouvons atteindre, encore et encore, toujours plus profondément, au travers des maladresses et des attentes.

Je t’ai parlé de ces préoccupations. Et ta réponse m’a chaviré. Ta réponse a créé cet espace en moi pour t’accueillir encore davantage. Tu m’as dit : « Je te fais confiance. » Et après un long silence : « Tu es beau, Jean-François. » Et pas un beau couverture de magazine beau, mais un beau qui passe au travers du corps, qui coule par les yeux. Je lui ai dit que j’étais heureux. Que je sentais que tout allait bien. Qu’on me disait même que je semblais bien et serein. Elle a senti mon trouble et ma peur, et à cela elle a répondu, un éclair de lumière dans les yeux et le plus beau des sourires du monde : « Ça se peut. Ça se peut que tout aille bien. » Ce magnifique espace en moi, ouvert. Sans même le savoir, j’avais tout simplement besoin d’être rassuré. Et sans une seconde d’hésitation, c’est ce qu’elle a fait. Sans doute aucun. Entière. Belle. Amoureuse.

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Une musique douce. Une chaleur réconfortante. Nos corps enlacés. Nous avons fait l’amour, cet après-midi-là. Sans se poser de questions. Présents. Ensemble. Tout simplement.

Merci.

 

[Source de l’image: Unsplash]

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