La première règle était claire : ne refuser aucun rendez-vous, aussi blind soit-il.
Pris devant le fait accompli, mes sentiments étaient mixtes. L’excitation de rencontrer un nouvel amoureux potentiel me galvanisait, mais mon côté perfectionniste angoissait de ne pas pouvoir me présenter sobre, en total contrôle de mes gestes et de mes paroles, vêtu de la dernière collection Zara qui préconisait, à l’époque, les imprimés fleuris…
Tel un bouquet de fleurs humain, je me serais jeté dans les bras de ce bel adonis au coeur pur et à la recherche de son âme soeur depuis l’été de ses 11 ans.
C’est toi, Antoine?
Il avait réussi à me surprendre, perdu dans mes pensées de pistils et d’étamines.
Euh… Oui, c’est moi. Allô.
Le chronomètre s’était enclenché. Les secondes démarraient leur course folle. Combien de temps allait durer ce blind date avec celui dont j’ignorais encore tout, à commencer par son nom?
Rencontrer l’ami d’une amie a ses avantages. Les antécédents du candidat sont habituellement connus, ce qui nous évite de devoir éplucher son CV pour tenter de découvrir s’il a un casier judiciaire.
Comprenez-moi bien : je n’ai jamais rien eu contre les criminels, tant que leur peine a été purgée en totalité.
Mais la courte liste de bons côtés s’arrête là. Car voilà le gros problème avec les blind date organisés par des amis : ce n’est pas parce que tu t’entends bien avec deux personnes, qu’ils sont forcément faits pour vivre ensemble.
Votre rêve de matcher vos deux amis gais, faites-en votre deuil!
La conversation avait à peine débuté que déjà, un gyrophare rouge clignotait au-dessus de la tête de mon rencart : DANGER, DANGER!
J’avais vraiment envie de ramener ce garçon illico chez moi pour… lui montrer ma collection de vinyles des années 80, ou me taper pour la septième fois la série complète de Six Feet Under, ou lui faire goûter la toute nouvelle recette de poulet tandoori upgradée découverte dans le dernier magazine Ricardo spécial « épices ».
Je venais de me faire un super nouvel ami potentiel tout en vivant le sentiment malaisant d’être en rendez-vous avec soi-même.
Vous êtes pareils, vous êtes faits pour être ensemble.
Justement, non. Je ne suis pas narcissique au point de chercher à embrasser ma copie conforme. En fait, si on pouvait s’en éloigner complètement, ça m’aiderait peut-être à travailler sur mes défauts plutôt que de les avoir en pleine face tous les matins… Et de les vivre en double!
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Contre toute attente, on s’est revus. J’étais à jeun, j’avais mis ma plus belle chemise fleurie.
Il m’a présenté à ses amis, on a passé une belle soirée. Mais pas de bisous, pas de poulet tandoori. Pas d’envie.
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Les jours avançaient toutefois à une vitesse folle. Je n’avais eu aucune autre invitation et du mois que j’avais pour rencontrer l’amour, il me restait dix jours et deux défis titanesques : donner mon numéro de téléphone à un inconnu, et coucher avec un gars le premier soir.
Maudit défi de marde!
À suivre…
[Source de l’image : Pixabay]
